Introduction à la vie spirituelle

Introduction à la vie dévote
Mise en français contemporain. Une initiation pratique à la vie spirituelle par François de SalesÉdition établie par Didier-Marie Proton

Collection « Trésors du Christianisme »

Editions du CERF

ISBN : 978-2-204-08310-2 – SODIS : 8279459 – EAN : 9782204083102
En 1609 paraissait la première édition de l’« Introduction à la vie dévote » de saint François de Sales, évêque de Genève en résidence à Annecy. Il se proposait d’indiquer un chemin de sainteté – la vraie « dévotion » – à la portée de chacun, quels que soient son état de vie, sa situation sociale, son âge ou sa santé. Le rayonnement de ce livre fut tel que l’on peut considérer qu’il inaugura le renouveau spirituel du XVIIe siècle.Il ne cessa d’irriguer la piété catholique jusqu’au milieu du XXe siècle. Après avoir frappé les esprits par sa nouveauté, la doctrine spirituelle de saint François de Sales est devenue depuis – en particulier avec Vatican II et l’appel universel à la sainteté de tous les baptisés – la doctrine commune de l’Église. Bien que longtemps acheté (les très nombreuses éditions en font foi), l’ouvrage cessa pratiquement d’être lu en raison des difficultés que présente une langue devenue trop difficile pour qui n’a pas étudié les lettres classiques. C’est pourquoi cette « mise en français contemporain » a été tentée. Il ne s’agit pas d’une adaptation, mais d’une transcription fidèle du texte original. Celle-ci permettra de constater que l’« Introduction à la vie dévote », par la pertinence de ses conseils pratiques, par le charme de la forme et par la justesse des observations psychologiques, demeure l’un des joyaux de la tradition spirituelle catholique.

Introduction à la vie dévote première partie chapitre 3

Dieu commanda en la création aux plantes de porter leurs fruits, chacune selon son genre : ainsi commande-t-il aux Chrétiens, qui sont les plantes vivantes de son Eglise, qu’ils produisent des fruits de dévotion, un chacun selon sa qualité et vacation. La dévotion doit être différemment exercée par le gentilhomme, par l’artisan, par le valet, par le prince, par la veuve, par la fille, par la mariée ; et non seulement cela, mais il faut accommoder la pratique de la dévotion aux forces, aux affaires et aux devoirs de chaque particulier. Je vous prie, Philothée, serait-il à propos que l’Evêque voulût être solitaire comme les Chartreux ? Et si les mariés ne voulaient rien amasser non plus que les Capucins, si l’artisan était tout le jour à l’église comme le religieux, et le religieux toujours exposé à toutes sortes de rencontres pour le service du prochain comme l’Evêque, cette dévotion ne serait-elle pas ridicule, déréglée et insupportable ? Cette faute néanmoins arrive bien souvent.

Non, Philothée, la dévotion ne gâte rien quand elle est vraie, ainsi elle perfectionne tout, et lorsqu’elle se rend contraire à la légitime vacation de quelqu’un, elle est sans doute fausse. L’abeille, dit Aristote, tire son miel des fleurs sans les intéresser, les laissant entières et fraîches comme elle les a trouvées ; mais la vraie dévotion fait encore mieux, car non seulement elle ne gâte nulle sorte de vocation ni d’affaires, ainsi au contraire elle les orne et embellit. Toutes sortes de pierreries jetées dedans le miel en deviennent plus éclatantes, chacune selon sa couleur et chacun devient plus agréable en sa vocation la conjoignant à la dévotion : le soin de la famille en est rendu paisible, l’amour du mari et de la femme plus sincère, le service du prince plus fidèle, et toutes sortes d’occupations plus suaves et amiables.

C’est une erreur ainsi une hérésie, de vouloir bannir la vie dévote de la compagnie des soldats, de la boutique des artisans, de la cour des princes, du ménage des gens mariés. Il est vrai, Philothée, que la dévotion purement contemplative, monastique et religieuse ne peut être exercée en ces vacations-là mais aussi, outre ces trois sortes de dévotion, il y en a plusieurs autres, propres à perfectionner ceux de dévotion, il y en a plusieurs autres, propres à perfectionner ceux qui vivent des états séculiers. Où que nous soyons, nous pouvons et devons aspirer à la vie parfaite.

 

 

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